Didier Super : « On a l’impression que les gens, c’est des cons, mais en fait, ça va ! »

C’est dans le plus vieux cabaret de Bruxelles, après son quatrième soir à jouer, dans les éclats de rire, interruptions de petits comiques et grincements de dents, sa comédie musicale sobrement intitulée Ta vie sera plus moche que la mienne que j’ai rencontré le trublion douaisien. Interview-fleuve d’un mec bien.

"Didier Super pas du tout en concert. Ta vie sera plus moche que la mienne." Didier Super avec un nez de clown devant une foule.

T’es qui ?

[Voix de Didier Super :] Moi, je m’appelle Didier, je suis une grande vedette.

Et c’est quoi, être une vedette ?

Une grande vedette, c’est qu’y a plein de cons qui payent. Pour m’écouter. Chanter. [Le patron de l’Os à Moelle vient lui amener à boire] Et en plus, je ne paie pas mes bières !

Ça marche ?

Ben, pfff, ça marche… On n’est pas non plus, euh, au Cirque Royal, je sais pas quoi, hein. On est dans une cave… [à un membre de l’équipe, qu’il fait rigoler :] C’est ça, fais du bruit ! Tu vois, mais quand j’engueule les gens bêtement, ils rigolent. C’est ça, être une vedette !

T’es devenu une plus petite star, maintenant ?

En fait, c’est que depuis le début, ça stagne. Tu sais, c’est comme si j’avais acheté euh… au lieu d’avoir une bagnole avec des vitesses pour aller de plus en plus vite, j’ai une mobylette avec un variateur mais aucun embrayage.

Tu vends du rêve…

Par contre, je vends du rêve. Exactement.

Est-ce que je peux poser une question à Olivier ?

Vas-y, on verra.

Gros plan sur la visage de Didier Super qui a l'air de dire qu'il fait pas le chercher, à l'Os à Moelle.

J’ai l’impression qu’il y a plein de gens qui ont décidé que, quelque part, tu leur appartiens et qui sont pas respectueux par rapport à toi…

Ha ! tu parles du public qui la ramène pendant le spectacle, peut-être ?

De ça et des commentaires youtube aussi.

Ha ! mais les commentaires, on s’en fout   On s’en fout ! On sait bien, hein, c’est toujours un peu névrotique et c’est caché derrière un écran.
Il y a quoi ? trois ans, j’ai eu le malheur d’être obligé de recadrer le… Dieudonné et sa « dieudosphère », comme ils disent et je me suis pris les foudres. Mais en fait, c’est quoi ? c’est que des commentaires. Il y a eu un petit peu des menaces de mort, des choses comme ça, mais c’est rien, c’est que des commentaires, ça reste de l’ordre du virtuel, on s’en fout.
Après, dans une salle, en général, les gens se tiennent.
Mais c’est sûr que si je sors tout de suite après le spectacle, je dois faire des photos. « Whô, Didier, je veux faire une photo ! » Bon. Ben je fais une photo. Puis après, je me casse.

Mais t’as aussi fait en sorte de choisir ton public. Tu t’es évertué, en tous cas, à essayer d’écrémer la chose.

Ben en fait, j’ai jamais fait de musique. Et il a fallu l’expliquer au public. Et ça a pris quinze ans. [Rires]

Est-ce que tu sais pourquoi ils réagissent comme ça ?

Je pense que le fait de vendre du rêve fait que le public croit que ça existe. Et je pense que le public se croit capable de se rabaisser à mon niveau. Alors qu’en fait, ça demande un peu de souplesse. Mais je pense que ça va pas plus loin que ça. Ils se disent : « Il le fait, je sais le faire aussi ! »

Et pourquoi on te réclame toujours Petit caniche ?

Tu vois, Sardou, par exemple, il a fait Le temps bénit des colonies et pourtant, on lui réclame La maladie d’amour. C’est quand même dommage ! Parce que Le temps bénit des colonies, elle est quand même bien meilleure. Et pourtant, tout le monde s’en fout.
En fait, j’ai compté il n’y a pas longtemps, je dois être à quatre-vingt cinq chansons. Bon, elles sont pas toutes réussies, hein — même aucune… [Il pouffe]
Mais en tous cas, oui, Petit caniche, c’est ma Maladie d’amour ! C’est le malentendu total !

Tu te définis souvent comme un artiste. Plutôt que comme un chanteur, un clown, un…

Ben si je me définissais comme chanteur, ce serait insulter les chanteurs ; si je me définissais comme clown, ça les insulterait aussi ; si je me définis comme humoriste, là, c’est moi qui m’insulte.
« Artiste », ça veut rien dire. Je parlais avec une copine qui programme des spectacles, et qui dit : « Ben, moi, je suis artiste ! » Et puis ben c’est tout.

T’as plusieurs spectacles qui tournent.

Quatre. Quatre spectacles qui tournent, oui. Même cinq.
Je sais pas si t’as vu, il y a pas longtemps, une petite bonne femme qui engueule Manuel Valls, qui dit machin « mais va falloir vous ressaisir, hein, parce que là, c’est pas terrible, hein ; des conneries, vous en avez faites ! » Et cette bonne femme, c’est Hervée Delafond, c’est le Théâtre de l’Unité. Et je fais un cinquième truc avec eux, c’est le parlement de rue et c’est génial ! C’est le pied ! Vraiment, je suis à leur service !
C’est deux vieux qui font du théâtre, mais pas du théâââââtre, t’sais : du théâtre utile, du qui réinterroge le cadre, pas du théâtre cautionné par le cadre et que du coup, ça n’a aucun sens, tout qu’ils programment à longueur d’années dans leurs théâtres municipaux de merde, ça dégoûte les gens plutôt qu’autre chose.
Et ils font un truc, donc, c’est le parlement de rue. Le matin, les gens, ils proposent des lois à la con. Ou des lois sérieuses… ‘fin, ça peut être le salaire minimum de base à six mille euros. Ça peut être qu’on apprenne le plaisir sexuel en plus de l’éducation sexuelle à l’école. Tu vois, ça va dans tous les sens. Et le spectacle, c’est une heure et demie de débat sur une vingtaine de lois. Et ça, ça c’est drôle ! Donc, ça, c’est le cinquième truc avec lequel je bouffe.
Et en gros, pour les spectacles, en général, c’est celui-là qui tourne, là, Ta vie sera plus moche mais après c’est selon ce qu’on me demande. Un festival de rue, il va me demander notre truc avec les vélos, quelqu’un qui a vraiment de la thune, il va demander la comédie musicale, quand je sens que ça va être un peu le bordel, ben je vais prendre le vieux solo.

Et tu tournes encore avec Zeu Discomobile aussi ?

Non, ça, on a arrêté en 2012. Mais du coup, je suis en train d’en remonter une par chez moi, là. Mon voisin est batteur, alors…

Si tu avais un conseil à donner à quelqu’un qui a envie de commencer la scène, qu’est-ce que tu lui dirais ?

Ben je lui demanderais : si ce n’était pas un métier valorisant, est-ce qu’il chercherait quand même à monter sur scène ? Je pense que ça écrémerait une bonne partie du métier. [Rires]

Comment est-ce que tu te démerdes sur la production, maintenant ?

Ben ça, c’est un autre conseil que je donnerais à quelqu’un qui veut commencer le métier, c’est que si un quelconque producteur vient vers toi parce qu’il a envie de te produire, dis-toi une chose, c’est que tu peux te démerder sans lui. Voilà. Donc, euh, ça se passe très bien.
En fait, je m’aperçois aujourd’hui que, à peu de choses près — parce que c’est pas complètement vrai pour tous — les producteurs que j’ai eus, c’était des gens qui n’ont jamais filé un coup de main, mais qui ont pompé une grosse partie de ce que je gagnais juste à répondre au téléphone quand ils voulaient me faire jouer quelque part.
J’ai mis plus de dix ans à m’en rendre compte. Ben voilà, hein. Il y a pas d’âge pour être moins con !

Et les maisons de disques, ça a changé depuis le net ?

Ben de toutes façons, tout ce qui a trait au disque, c’est pareil, faut arrêter de croire qu’avec une maison de disques, on… [Rires] La seule chose qui n’a pas dû évoluer, c’est leurs discours gratifiants pour dire « Coco, je vais faire de toi le nouveau Untel ou Untel ou Untel ! » Ça, ça n’a pas bougé, après le reste, oui.
Mais les maisons de disques, faut arrêter !

Comment ça se fait qu’il y avait si peu d’artistes qui ont osé avoir un discours critique sur leurs maisons de disques ? Ils ne t’ont pas fait signer une clause de confidentialité dans ton contrat ?

[Rires] Là, sur la BD, ils ont rien dit et j’ai compris que en fait…
Est-ce que t’as vu le film Merci patron ! ? Tu sais, François Ruffin, il s’amuse à faire chier la bande à LVMH, et pour pas avoir de mauvaise pub, LVMH lâche un chèque de quarante-cinq mille euros. Ben en fait, c’est ça. Sur la BD, ils ont rien dit parce que — surtout Universal — ils veulent pas de problème d’image. Donc là-dessus, non, il y a pas eu de souci.
Après, si y a peu d’artistes ouvrent leur gueule, je pense qu’aujourd’hui, malheureusement — ben c’est comme dans beaucoup de postes, hein, c’est pas que sur les artistes — la place l’emporte sur la fonction. Les gens préfèrent servir à rien mais être grassement payés en tant que tels.
Je pense les programmateurs de spectacles qui viennent me voir et qui disent : « J’adore, mais je ne pourrais jamais passer ça chez moi », c’est un peu du même acabit, quoi. Les gens flippent pour leur place, peut-être. Peut-être.
Et puis après il y a des artistes qui ont autre chose à dire aussi, hein.

Quel est le plus grand pied que tu aies pris dans ta vie professionnelle ?

Ah, il y en a plusieurs.
Je crois que le plus gros pied, c’est quand je suis allé jouer en 2012 en Nouvelle-Calédonie. Donc, colonie française, hein, disons-le. Et juste avant de partir, deux semaines avant de décoller, j’ai dit au copain qui voulait me faire jouer : « Si tu veux, je te fais une vidéo rigolote pour faire un peu la communication. » Parce qu’à Nouméa, bon, Didier Super, je pense pas que ce soit une priorité. Donc, j’ai fait une petite vidéo à base de Kanaks, de singes et de bananes. Je prépare mon sac : j’ai ma tronçonneuse anti-Kanaks, j’ai ma hache anti-Kanaks puis à la fin, j’ai mes bananes anti-Kanaks parce que des noirs, c’est des noirs.
Au bout de six heures de mise en ligne, cette vidéo a fait que le festival a été suspendu par la mairie et j’ai eu des menaces de mort par milliers. Là dessus, on a fait ce qu’il fallait, on a éteint un peu le feu, surtout auprès des communautés kanakes qui étaient très très énervées.
Je suis allé à Nouméa avec quatre gardes du corps qui m’attendaient à l’arrivée, quand même, au cas où. Et la pub a fait que le spectacle était complet. On avait énormément de Kanaks, du coup, qui se sont intéressés à l’histoire. Alors que normalement, être dans une salle fermée pour regarder un spectacle, c’est pas trop leur truc.
Je me suis retrouvé à jouer, du coup, devant énormément de gens qui se seraient pas intéressés à l’histoire s’il n’y avait pas eu ce petit merdier.
Et là, ça devient un petit peu coton, tu vois ? Ça fait jouer en marchant sur des œufs, d’avoir des gens qui sont là : « C’est quoi, l’enculé de blanc, là ? »… Et de réussir à les embarquer dans cette histoire-là. Oui, ça c’est… Ça, c’est un peu le panard, quoi !

Un autre pied que j’ai pris, c’était il y a deux ans. J’étais invité sur un festival de chânsôn frââânçaise mais j’étais pas annoncé, personne savait ce que je faisais et je leur ai fait le sketch du seau d’eau.
Alors, le sketch du seau d’eau : je leur explique pourquoi un pauvre doit rester pauvre en mettant la tête d’un pauvre dans un seau d’eau et en expliquant que tant que le pauvre respire un minimum, il ne peut pas se plaindre, mais par contre, dès qu’il respire un petit peu, dès que je lui offre un peu de confort, il en profite pour m’engueuler.
C’était un peu expérimental. À l’issue de ce numéro, j’ai eu aucun applaudissement. J’avais prévu de faire encore deux chansons derrière et je les ai pas faites. Et même les copains qui étaient dans la salle [il pouffe] ils ont mis quelques temps avant de me reparler ! [Rires]
Après, ça, artistiquement, c’est bien, mais commercialement, c’est pas viable !

Est-ce qu’il y a certaines choses qui sont plus difficile pour toi à foutre dans un spectacle ?

Les handicapés, peut-être ? Non, on s’en fout !
En général, j’aime pas trop faire des trucs sur la télévision, sur les politiciens… parce que se foutre de la gueule de quelque chose qui se fout déjà de ta gueule, ça a quelque chose d’un petit peu inutile, quoi !

Est-ce que tu sens que ton humour est transposable dans d’autres cultures ?

Carrément ! En 2013, je suis retourné en Nouvelle-Calédonie pour répéter un peu celui-là [de spectacle] et pour enregistrer l’album sur un archipel à côté. Et là, j’avais cent Kanaks et cent blancs sous un chapiteau dans un village kanak réputé très indépendantiste. Il a fallu en foutre plein la gueule aux Kanaks aussi parce que sinon, c’était hyper malsain. Et ça c’est hyper bien passé, en fait.
Et je leur ai balancé une saloperie sur leurs coutumes : quand tu vas chez quelqu’un, t’as un manou, c’est un tissu traditionnel et tu mets une somme symbolique d’argent machin, et t’offres ça avec un petit discours de remerciement.
Quand le spectacle a commencé, ben il y a eu cet échange de tissu — c’est très sacré. Et puis en plein spectacle, je me suis dit : « Putain, les Kanaks, ils n’ont pas assez pris ! » et je leur ai dit : « Ben j’espère que j’aurai jamais à revenir dans ce genre d’endroit où pour être autorisé à jouer, on est obligé de planquer de la thune dans un bout de tissu à la con ! » Il y a eu cinq secondes de blanc et après, c’est passé. Mais en fait, je crois que les zoreilles, ils ont beaucoup plus flippé que les Kanaks eux-mêmes, c’est ça qui est bien !
À chaque fois, on croit que Untel va être choqué, que moi ça va mais que lui, mais il va être choqué.
Et c’est souvent le cas avec les enfants, t’sais, on dit : « Oh, faut pas faire ça devant les enfants » mais en fait, c’est les adultes qui se transposent.

Et en Inde, même chose ?

Oui oui, un minimum quand même. Mais en fait, il faut pas croire mais… On a l’impression qu’en fait, les gens c’est des cons, mais en fait, ça va !

Mais ils comprenaient ce que tu faisais, avec la barrière de la langue ?

Alors, parfois, c’était un peu costaud.
Par exemple, dans Misère joyeuse, il y a eu un moment un peu coton à tourner, c’était quand j’étais dans un cycle richshaw, là, où t’as un mec qui pédale — un pousse-pousse à vélo, quoi. Et le mec, je le fouette en lui disant : « Allez ! Avance ! »
Et à chaque fois, j’arrêtais un rickshaw en lui disant : « Alors voilà, on va tourner un film, machin » mais le mec, il cannait absolument rien ! Donc à chaque fois, fallait que je chope un Indien qui avait un petit polo, t’sais : ceux qui avaient des petites lunettes et des petits polos, ils parlaient anglais ! Et donc eux, ils traduisaient. Mais malgré tout, le gars qui conduisait le rickshaw, il faisait « huh huh » [onomatopée affirmative] mais une fois que c’était parti, je lui faisais « Allez ! Vas-y ! » [gestes de fouettage], il se retournait et il me faisait : « Ben qu’est-ce que t’as ? » [visage vachement interrogatif] « Non non, c’est bon ! Cool ! Cool ! » C’était un peu compliqué, des fois ! Mais ils finissaient par se marrer, quoi !
C’est comme faire dire : « Merci tsunami » à des gens qui ont habité la côte qui a été balayée par la vague : les mecs savaient très bien ce qu’ils faisaient. Et ils savaient bien aussi pourquoi on le disait. Parce qu’effectivement, les aides mondiales humanitaires ont fait financièrement quand même pas mal de bien à des gens. ‘fin notamment, il y a des villages où des pêcheurs qui avant devaient louer leurs barques à des Thénardier, bon ben ils avaient chacun leur bateau, hein ! Ça a quand même fait du bien.

Quelle est ta plus grande colère professionnelle ?

Je sais pas si je suis en colère. Qu’est-ce qui me fout en colère ?
Le premier truc qui me vient, c’est le tableau comptable du producteur qui t’adore mais qui « perd beaucoup d’argent avec toi ». Mais une fois que t’analyses un peu la comptabilité d’un producteur, tu comprends la crise actuelle ! Où on t’invente des charges, où on t’invente des dettes… Ce qui fait que tu peux jamais t’en aller de chez un producteur [ton sarcastiquement larmoyant :] « parce qu’il a perdu tellement d’argent avec toi alors qu’il t’aime tellement ! »
Et je pense que c’est comparable vraiment à la dette de l’Europe ! [Rires]

T’as fait des spectacles en prison ? Comment c’était ? Raconte !

Hé ben, c’était la fête, hein, qu’est-ce que tu crois, toi ? [Rires]
Non, c’était bien ! On a fait notre spectacle de rue, donc, avec nos vélos, et on est allé dans un centre de détention où les gens prenaient minimum cinq ans.
Ben qu’est-ce qu’on peut raconter ?
Déjà, on est surfouillé. Surfouillé avant de rentrer ! La moindre pièce de monnaie, elle est analysée, c’est terrible ! Et une fois qu’on est fouillé, ben les gars, ils te disent : « C’est bon, on rentre le camion ! » Et donc, le camion, avec les caisses à outils, le cutter, ça, ils n’en ont rien à branler !

T’es en train de donner des trucs pour faire rentrer de la drogue en prison en interview, là !

Oh ben de la drogue ou des cutters, hein ! Ou des armes !
Non mais c’est vrai, ils ont pas fait gaffe mais on avait notre caisse à outils qu’on a laissée ! On est allé bouffer au mess et on a laissé dans une pièce accessible aux détenus une putain de caisse à outils ! On aurait pu mettre ce qu’on voulait dedans ! Ça, il faut le savoir, quand même ! [Rires]
C’était une prison qui était fournie à 70% par des criminels sexuels et où le coach maton nous expliquait que la plupart de ces pauvres gens, là, ils avaient eux-mêmes subi. Et effectivement, après, on a passé deux jours super avec des gens, ouais, qui avaient fait des saloperies, qui en avaient certainement subi.
Et on m’a reproché, dans la chanson Y en a des biens d’avoir dit que « les curés intégristes, comme les pédophiles, y en a des bien » alors que ouais ouais, on a eu affaire à des gens qui ont eu un parcours un peu spécial mais tu fais abstraction de ces histoires-là, ben ouais, ça reste des gens. Putain, faut quand même pas déconner, quoi !
Après, on a eu un jour réservé aux femmes. Le maton, toujours le même, qui t’explique que 99% des femmes détenues ont fait des conneries en relation avec un mec. Pour un mec, à cause d’un mec, il y a quand même toujours une histoire de mec.
Vous êtes quand même des sacrées connasses ! [Sourire]

Pourquoi t’as passé deux jours là-bas ?

Ben ils nous ont fait jouer deux jours !

Ha ! t’étais pas pendant deux jours en prison ?

Non, on a eu le droit de sortir ! ‘fin, t’sais, le truc, quand même, c’est qu’on est en survêtement dans ce spectacle, on joue un peu les mecs un peu lose. Et tous les taulards sont en survêt ! [Rires] Donc, des fois, les matons, ils nous débloquaient pas les portes ! [Rires]

T’as un plaisir honteux ?

Est-ce que j’ai…? C’est quoi, un plaisir honteux ? Ouais, je vais au Mac Do !
Même, ce qui est vraiment honteux, c’est que je trouve que Burger King, c’est quand même meilleur que Mac Do !
Et à chaque fois que je vais jouer dans l’Ouest de la France et qu’on part par la gare Saint-Lazare — je suis pas parisien, hein, j’habite Sète — mais de Sète, on prend le train jusque Paris, paf, dans l’Ouest on va à la gare Saint-Lazare et à Saint-Lazare, en face des quais, au fond à droite, il y a un putain de Burger King et ils servent hyper vite ! Même quand t’as le train dans une demi-heure et qu’y a trop de monde ! Eh ben, tu restes et en un quart d’heure t’es servi !

Est-ce qu’il y a une anecdote que t’as envie de raconter ?

Non.

D’accord. Et quelque chose à rajouter ?

Non.

Tu nous racontes une blague ?

Tu veux une blague ? Attends… Qu’est-ce que euh… Ça fait longtemps que j’ai pas raconté une blague ! Euh… Attends. Ça va venir, hein. De toutes façons, c’est du numérique, hein, ça use pas la bande !…
Hmmm… Une blague… Putain, je les ai toutes oubliées ! La seule que je connaisse vraiment, c’est : « Comment on fait pleurer une petite fille pour la deuxième fois ? C’est quand t’essuies ton zizi plein de sang sur son nounours ». Mais putain, c’est la seule que j’ai retenue !

Ben voilà, c’est fini.

C’est vrai ?
Et alors, c’est quoi, ton truc ?

C’est quoi, mon truc ? Euh… Attends, je peux couper…

Non, maintenant, on est là, je prends en main l’interview !

Si tu veux ! [Rires] C’est un webzine sur la culture à Bruxelles.

T’es payée pour faire ça ?

Je fais ça bénévolement.

Parce que c’est bien que les gens le sachent ! [Il me met le micro devant la bouche]

Je fais ça bénévolement. Et puis, j’avais envie de te rencontrer.

Et ça va ?

Ça va. Je suis plutôt contente.

Alors, ça va. Parce qu’en général, quand on rencontre les gens qu’on a envie de rencontrer, on est déçu.

Ben j’avais un peu peur à cause de ça et ça va.

C’est vrai ? Ben alors, ça va, je suis content ! Attends, je coupe… Je sais pas le couper, ton truc.

C’est sur le côté.

Euh… parce que là, il y a…

L’autre côté.

Ha ! Là ! Putain, oui, d’accord ! Là !

Photos : Vincent Godart