Pascal Hologne, co-grand manitou du Brussels Short Film Festival

Pascal a volé le duplicateur de Calvin : on ne peut pas le rater quand on met un pied au festival du court-métrage. Il vogue sans cesse entre le bar du chapiteau et les présentations de séances ; quand il n’est pas en grande conversation avec un réalisateur étranger, il est en train de mettre des tournées. Cela fait maintenant seize ans que le papa du Brussels Short Film Festival offre des opportunités de fête et de découvertes artistiques à notre belle capitale. J’ai réussi à voler dix minutes à ce généreux homme pressé pour lui poser quelques questions. 

À gauche, les questions cinéma pour le Brussels Short Film Festival sous un bic Chimay. Àdroite, le programme du festival.

T’es qui ?
Je suis Pascal Hologne. Je suis un homme heureux cette semaine parce que je suis en train d’organiser un festival à Bruxelles. Sinon, je suis un terrien, quelqu’un qui passe du temps à essayer de procurer un peu de plaisir à ses contemporains.

C’est quoi, le Brussels Short Film Festival, une occasion pour des assistés sociaux de se bourrer la gueule ?
Non, mais dis ! ça va aller ou quoi ? Au départ, c’était une idée entre amis, à court terme, pendant qu’on était étudiants : l’envie de faire un petit événement pour concrétiser la fin de nos études de cinéma. Et puis après, c’est quelque chose qui a pris de l’ampleur malgré nous et qu’on essaie aujourd’hui de mener le plus loin possible. Et donc aujourd’hui, c’est un festival de vingt mille personnes qui projette trois cents films des quatre coins de la planète, qui fait venir des gens de presque partout et qui propose du cinéma, mais des fêtes également et beaucoup de rencontres.

Pourquoi le court ?
On a commencé parce que c’est un format qui nous était proche durant nos études : on réalise du court, on écrit du court, on vit dans le court quand on est étudiant en cinéma. En plus, c’était quelque chose qui, il y a seize ans, à Bruxelles, manquait. Il y avait des festivals de longs métrages qui avaient des petites sections de courts mais il n’y avait rien de spécifiquement dédié au court métrage. Il y avait un créneau à prendre dans ce genre-là, qui nous plaisait, donc, on l’a pris. Voilà.

Le court, genre en soi ou tremplin vers le long ?
Les deux. Évidemment, les deux.

Description: SFF Pascal Hologne-2

Qu’est-ce qu’il y a eu de marquant lors de cette édition du festival ?
Il y a un festival dans le festival qui vient de naître, c’est Next Generation, qu’on organise maintenant avec l’équipe de l’ex-FIDEC, le festival des écoles de cinéma. Maintenant, on aura le festival du court métrage avec ses compétitions nationale et internationale et en même temps, on aura Next Generation ! On a reçu mille trois cent cinquante films pour cette nouvelle compétition et il y en a trente-six qui seront projetés. Et puis aussi la remise des prix dans une belle grande salle. On a grandi au Vendôme et on y reste très attachés mais la salle pour la remise des prix était un peu étroite donc maintenant, on va pouvoir profiter du grand Studio 4 à Flagey.

Des changements prévus pour l’année prochaine ?
Ah ! il y a plein de choses mais top secrètes ! On est dans des moments charnières, là, et c’est difficile de dévoiler pour le moment ce qu’il se passera l’année prochaine mais il y aura sans doute du neuf.

Qu’est-ce qui te fait bander dans le cinéma ?
Deux choses. En coulisses, c’est la rencontre de gens qui sont en général passionnants et passionnés, des gens désintéressés financièrement parlant. C’est un métier où les rencontres se renouvellent perpétuellement. C’est assez chouette.

Et d’un point de vue totalement filmique, c’est que c’est un art qui est potentiellement un des plus populaires. Donc, c’est quand même assez bandant de voir quand ça marche — et là, je ne mets pas la popularité en lien avec l’aspect commercial des choses. On peut être commercial et mauvais, commercial et bon et on peut être intimiste et bon et intimiste et mauvais. — mais un truc qui est bandant dans le cinéma, c’est que si tout se passe bien, parfois, il se passe des miracles. Des films qui peuvent rencontrer un public énorme, tout en étant bons, et ça permet d’avoir une portée que, malheureusement, d’autres expressions artistiques ne peuvent pas s’offrir.

Description: SFF Pascal Hologne-3

Qu’est-ce qui te fait bader dans le cinéma?
En coulisses, c’est la différence entre la situation financière de certains et d’autres. L’écart entre les petits salaires et les gros salaires, je trouve ça assez indécent dans le cinéma. C’est d’ailleurs ce qui me posait beaucoup de problèmes quand je faisais de la direction de production et c’est sans doute pour ça que je n’en fais plus. Je sais que, voilà, c’est difficile de faire autrement mais je n’arrive pas humainement à demander à un stagiaire régie qui a travaillé pendant quatorze heures pour pas grand chose de dormir dans un couloir de prod pendant que d’autres, au même moment, sont payés des fortunes et dorment dans un cinq étoiles. Le système le veut, je le sais, mais ce n’est pas quelque chose de terrible.

Et l’autre aspect plus visible qui me fait chier dans le cinéma, c’est la toute puissance de la promotion. Les gens ne vont pas voir un film parce qu’ils se sont renseignés pour savoir si ils allaient l’aimer, ils vont voir un film parce qu’on leur a martelé le cerveau à coup de pub. On ne laisse plus de temps du tout au bouche à oreille. C’est pratiquement impossible qu’un film décolle lentement grâce au bouche à oreille. Donc, on démarre tout de suite ou bien on meurt. Et pour démarrer tout de suite, il faut beaucoup d’argent.

Où est-ce qu’on peut voir les films que t’as produits ?
C’est marrant, ce sont les cordonniers qui sont les plus mal chaussés. Je pense que les courts que j’ai produits sont les films les plus difficiles à voir au monde alors que j’organise un festival de court métrage qui attire vingt mille personnes tous les ans. Faut m’écrire au bureau et me demander d’envoyer une copie.

Il paraît que tu es drôle. Tu nous racontes une blague ?
Je suis pressé donc je vais faire une blague qui est vraiment de circonstances. C’est l’histoire du petit toutou, c’est une histoire que mon père me racontait souvent quand il en avait marre : c’est l’histoire du petit toutou et quand c’est fini, c’est tout.

Description: SFF Pascal Hologne-12

Photos : Gautier Houba