Noël Godin n’est pas juste un discobole pâtissier : c’est un cinémaboule ! Pour clôturer ma série d’articles sur l’Offscreen, j’ai demandé à ce personnage haut en couleurs et d’une gentillesse extrême de m’accueillir dans son antre afin de me parler de son festival préféré.
Qui es-tu, Noël Godin ?
Je suis un grand fripon qui a déclaré la guerre aux esprits pète-sec de toute farine depuis belle lurette.
C’est quoi, l’Offscreen pour toi ?
C’est sans doute le meilleur festival existant à Bruxelles. C’est un festival chouettissime. Enfin quelque chose qui ne s’adresse pas aux pénibles étudiants de cinéma souvent nombrilesques rêvant de devenir des auteurs chiants, mais qui s’adresse aux vrais cinémaboules dont je m’enorgueillis d’être totalement !
Les cinémaboules ?
Le cinémaboule, contrairement au cinéphile, ne va pas voir quelques films d’auteur bien choisis, il va tout voir. Il est branché avant tout cinéma de genre, crache sur la plupart des auteurs consacrés et adore découvrir des trucs a priori tordus ou curieux. Les programmateurs d’Offscreen sont des cinémaboules.
L’Offscreen et toi, c’est une longue histoire…
Je les ai tous faits et j’ai vu tous les films. Depuis la première édition, c’est la même politique : quelques rétrospectives totalement éperonnantes autour d’auteurs cinglés ou bien qui ont leur légende dans les milieux cinémaniaques. Et puis des découvertes totales, surtout asiatiques et italiennes, ce qui est une politique qui fait totalement ma joie.
À côté de ça, je suis plus perplexe pour leurs films inédits mais je me mets à leur place, c’est très très difficile de trouver des films absolument inédits qui soient aussi bandants que les vieux films qu’ils montrent.
Tu vas à toutes les séances ?
Je vais voir ce que je n’ai pas vu. Je ne peux les gronder que sur un plan, c’est que tout le monde a l’air de connaître l’anglais sauf moi et que dans les autres festivals, il y a des sous-titres. Ils n’ont sans doute tout bonnement pas le temps de tous les trouver et n’en ont pas réellement besoin : ils n’auraient guère de spectateurs ni de taux de satisfaction de plus. Ils ne vont quand même pas faire des sous-titres rien que pour moi !
On peut te trouver au bar, aussi ?
Oui. Entre les films, au bar. Je n’ai le temps de me restaurer que là-bas mais, sapristi, leurs tables d’hôtes, c’est pour les moineaux, c’est pour les petits appétits de rien du tout ! Moi qui suis un grand goulafre, je dois me resservir aussitôt !
Tu serais intéressé par une collaboration avec eux ? Une carte blanche, une rétrospective ?
Si d’une façon ou d’une autre, ils veulent que je trempe là dedans, ça sera bien volontiers !
Quels sont tes projets ?
Pour ma part, je viens de tourner dans le dernier film de Yolande Moreau. Je me suis extrêmement bien amusé !
Je suis aussi embarqué par des jeunes pétroleuses dans un long-métrage sur les nouvelles guérillas ludiques contre toutes les saloperies trônantes. Il va se tourner dans plusieurs pays, dont la Suède, où je vais aller visiter quelques communautés anar de pointe en la meilleure compagnie, donc ça m’excite beaucoup.
À part ça, je m’occupe de chroniques anarcho-littéraires dans sept magazines dont le Siné Mensuel, ce qui m’amuse beaucoup. On m’y laisse déconner complètement sans la moindre censurette, donc c’est bien plaisant.
Tu es aussi programmateur du festival du film grolandais.
Oui. Depuis la première édition. Ils m’avaient proposé de faire partie du directoire du festival en question mais j’ai préféré me faire nommer Secrétaire Perpétuel du Jury — ce qui fait très déraisonnable ! À vie.
L’entartage, c’est fini ?
Ça peut recommencer à tout moment. En tête de liste, l’ignoble Manuel Valls.
Qu’est-ce qui te fait bander dans le cinéma ?
Je suis amateur avant tout de vieux cinéma hollywoodien, j’aime les personnages forts qui tiennent vraiment leur vie en main, pleins de panache, risque-tout, qui savent aimer d’une façon démesurée et totale, comme on n’en voit plus guère dans le cinéma d’aujourd’hui.
Qu’est-ce qui te fait bader dans le cinéma ?
J’adore pleurer aux vieux mélos hollywoodiens mais du moment que les personnages niquent leur mauvais sort, ce qui arrive très peu dans le cinéma d’aujourd’hui où on s’installe dans le désespoir avec une compassion totalement crapoteuse. Et puis j’adore rire, ce qui n’arrive plus guère dans le cinéma sauf avec les frères Farrelly ou Benoît Delépine et Gustave Kervern, mes cinéastes français de prédilection.
Un plaisir cinématographique honteux ?
Jamais honteux : je n’ai point de honte dans ma vie à me branler ou à faire n’importe quelle bêtise…
Donc non, d’autant moins que je ne suis guère porté sur le cinéma porno, que je trouve chiant comme la pluie, sauf quand c’est réalisé par Jean-Pierre Bouyxou dont tant Entrez vite… vite je mouille ! que Amours collectives sont vraiment des films porno jubilatoires.
Finissons-en avec toute forme de honte pour quoi que ce soit ! Soyons seulement honteux quand on se renie d’une façon ou d’une autre ou quand on renie ses passions pour les films fous !
La honte au pilon et viva Offscreen !
Crédit photo : Gautier Houba