Leurs blagues

J’ai demandé très souvent, lors de mes interviews, qu’on me raconte une blague.
Déjà, moi, dans la vie, j’aime ‘co ben rigoler, mais surtout, je trouve que le type de choses qui fait rire quelqu’un ainsi que la manière dont il raconte une blague — surtout quand son interlocutrice lui pose la question à brûle-pourpoint — en dit énormément sur cette personne.
Les voici donc rassemblées.

Clotilde Delcommune interviewe le groupe La Horde à la Porte Noire. L'un d'entre eux à une moustache fort excentrique.

La horde :

Arno Quel est le point commun entre une Ferrari et une petite fille ?
C’est pas facile de rentrer dedans, mais une fois que tu y es, ça déchire !

Nicolas Qu’est-ce qu’il y a de pire que de faire tour­ner un enfant mort à une corde ?
L’ar­rê­ter avec une pelle.

Mathieu Moi, je vais la faire plus soft, pour chan­ger… Tu connais le point commun entre un ascen­seur et une femme ?
Tu mets ton doigt où t’ha­bites.


Pascal Hologne du Brussels Short Film Festival est accoudé au bar du chapiteau de celui-ci, un verre de Chimay à la main.

Pascal Hologne :

Je suis pressé donc je vais faire une blague qui est vrai­ment de circons­tances.
C’est l’his­toire du petit toutou, c’est une histoire que mon père me racon­tait souvent quand il en avait marre : c’est l’his­toire du petit toutou et quand c’est fini, c’est tout.


Valéry Rosier regarde droit dans les yeux du lecteur. Il est accoudé à un flipper et a un petit sourire coquin.


Valéry Rosier :

Ça va être une magni­fique blague pour un article par écrit ! C’est euh… Attends, merde, ça va comment, encore cette blague ?
Tu connais la blague du menui­sier qui a perdu un doigt ?
Eh ben, elle est comme ça !
Retrans­cris-la telle quelle, sans même dire ce que je fais !


Françoise Cactus de Stereo Total est couchée sur un canapé en cuit, les jambes sur Brezel Göring qui regarde l'objectif l'air exténué.



Françoise de Stereo Total :

Alors, je te traduis une blague qu’on m’a racon­tée en alle­mand.
Un type arrive en courant à une station service, il se décu­lotte, il prend le bidule, le pisto­let, là, pour le machin… comment ça s’ap­pelle, ce truc ? Pour mettre l’es­sence, là. Oui, enfin, le pisto­let à essence. Il se le met dans le cul, il appuie.
Le mec du garage sort de la station service. Il sort, il lui dit : « Mais, c’est pas normal ! »
Et il dit : « Non, c’est super ! » [rires]
Voilà, c’est ça, la blague. C’est complè­te­ment con ! [rires]


Gros plan sur Myriam Leroy et son sourire mi-figue mi-raisin.

Myriam Leroy :

Attends, j’en ai entendu une, l’autre jour… Merde, je ne m’en souviens pas ! Je te raconte la seule blague que je connais. C’est une blague qu’on m’a racon­tée quand j’avais douze ans, hein — et à douze ans, je la trou­vais géniale ! Mais c’est très mauvais. Donc, si vous voulez ne pas rire, je ne vous en voudrais pas.

Alors, c’est une gonzesse qui accouche. L’ac­cou­che­ment est très doulou­reux, elle est à l’hô­pi­tal, ça ne s’est pas très bien passé… La déli­vrance a eu lieu mais ça a duré des heures, des heures, des heures. L’in­fir­mière lui prend son bébé pour lui faire sa toilette, part un petit temps et puis revient avec le bébé emmi­tou­flé dans une petite couver­ture. Moment de pléni­tude et de commu­ni­ca­tion totale entre la mère et l’en­fant.
L’in­fir­mière lui tend son enfant et au moment où la mère, une petite larme de joie à l’œil, veut saisir son bébé, l’in­fir­mière prend le gosse, le balance contre un mur, lui shote dedans, sur le crâne…
Et la mère fait : « Mais enfin, que faites-vous à mon enfant ? »
Et l’in­fir­mière répond : « Pois­son d’avril, il était déjà mort ! »


Dans son coquet salon, Isabelle Wéry et Clotilde Delcommune rigolent.

Isabelle Wéry :

C’est deux bites qui vont à la plage. Et il y en a une qui dit à l’autre : « Bon je vais me baigner, tu gardes les sacs ? »


Daniel Hélin pose, mi fier mi gêné, dans l'allée de l'Os à Moelle.




Daniel Hélin :

Je ne sais pas racon­ter de blagues. Je ne connais pas de blagues. Je fais bien les feintes sur le moment : des fois, elles tombent, tchouk ! mais…
Euh, j’ai les bêtes blagues que me raconte mon filleul. Je t’en fais une ?
David Bowie et Lady Di, ils ont deux garçons, ils s’ap­pellent comment ?
Kent et Alain. Parce que Bowie Kent et Alain Di.
Et voilà ! C’est con, hein ?


Portrait de Camille au Festival du Fanzine : elle est nue, debout, tient un modèle d'avion à la main et fait un salut de l'autre..

Camille de Pull de cheval :

Ah ben je vais vous racon­ter une blague de Vuille­min.

C’est une petite fille qui est dans la rue en train de fumer une clope. Mais vrai­ment, elle a son cartable, ses petites couettes, son petit chemi­sier rose, ‘fin, elle a vrai­ment pas plus de dix ans, quoi, voire même bien moins. Elle fume une clope dans la rue et t’as un monsieur qui passe et il lui dit : « Mais tu fumes une clope ! À ton âge ! Mais c’est juste pas possible ! Pourquoi t’es en train de fumer ? »
Et elle fait : « Oh, j’aime bien de fumer une clope, comme ça, quand je viens de faire l’amour ! »
« Quoi ? À ton âge ! Tu viens de faire l’amour ! Mais pourquoi ? Avec qui ? C’est pas possible ! T’es trop jeune ! »
« Avec qui ? Oh mais j’en sais rien, j’étais complè­te­ment bour­rée. »


Jérémy d'Experimental Trop Blues Band fait un grand sourire tandis qu'il joue de la guitare lors de leur concert à Bruxelles-les-Bains.



Jeremy de Experimental Tropic Blues Band :

Alors, c’est une blague de mon fils, qu’il a inven­tée.
C’est une fois Coco — c’est lui, Coco. Euh…. Je vais la faire avec toi.
C’est une fois Clotilde qui va à la boulan­ge­rie et qui dit « Bonjour tout le monde ! » mais il n’y avait personne. [rire]


Dans les coulisses du Brussels Summer Festival après son concert, Madé J fait un finger gun avec sa cigarette.





Made J :

Pourquoi il y a tant de problème de pédo­phi­lie en Belgique ?
Parce qu’il y a trop d’en­fants sexy.




It It Anita répondant à leur interview sur la terrasse du Botanique.



It It Anita :

Mike Comment c’était le truc ? J’ai oublié ! Ha non, j’ai oublié !
Le vendeur de trucs viet­na­mien sur le marché, là ! On lui vole un truc et il dit : « C’est ma nem, c’est ma nem ».

Damien Ha ! « C’est mes nems ! » Non ?

Mike Non. J’ai oublié le truc… J’ai pas le début, j’ai pas la fin, j’ai que le milieu mais c’est pas grave !


À la galerie Superchief, Mike Diana sourit et a l'air fort frêle.

Mike Diana :

J’en ai une bonne mais elle est visuelle.

Pas de problème, on va la filmer !
[C’est ici et en anglais.]

Moi et mon frère et mon père, on est allé à l’église. Une église catho­lique. On est assis à la messe et à l’église, tu dois te lever, te ré-asseoir, tu sais, selon les diffé­rentes parties de la messe.
Devant nous, il y a une grosse dame avec une robe. Moi, mon frère et mon père, on est assis là, derrière.
« Que tout le monde se lève, s’il-vous-plaît ! » La femme se met debout et sa robe est coin­cée dans sa raie du cul. Mon frère, qui est un mec poli, s’em­pare de la robe et la sort de là. Elle se retourne et lui donne une gifle, tu sais.
Puis le prêtre dit « Ok, asseyons-nous tous ! » du coup, on s’as­sied tous.
Après un moment, faut se lever à nouveau : le prêtre dit : « Ok ! Debout ! » et on ne veut pas être les seuls à ne pas le faire, du coup, on se lève. Et, de nouveau, la robe dans la raie du cul. Ce coup-ci, c’est mon père qui la retire de là, tu sais. Elle se retourne et le gifle.
Il est temps de se rasseoir, du coup, on s’as­sied, histoire de ne pas se faire remarquer.
Et puis il est temps de se rele­ver. Et cette fois-ci, la robe n’est pas coin­cée et du coup [mouve­ments des mains] je l’ai pous­sée là dedans.


Ivan Julian :

C’est mon anec­dote préfé­rée, je l’ai chopée dans un livre. C’est aussi pour te dire à quel point nous, les punks, on est rede­vables au jazz­men. Eux aussi, ils se sont battus pour tout le machin : pour avoir leur iden­tité musi­cale, pour avoir des lieux où jouer et tout le reste.
Donc voilà : c’était l’époque où Miles Davis jouait dans le groupe de Char­lie Parker ; et ils sont tous les deux instal­lés à l’ar­rière d’un taxi qui va vers le Village [Greenwich Village, à New York, ndlr].
À l’époque, c’était encore des gros taxis, un peu comme en Angle­terre, avec plein de place à l’ar­rière.
Char­lie Parker se met à bouf­fer du poulet. C’est ce qu’il fait : il bouffe du poulet ! Mais il ne s’ar­rête pas là : il se fait tailler une pipe, aussi. (Parce que bon, hein, qui n’a pas envie d’une pipe ? Merde, quoi, je veux dire, qui peut bien ne pas vouloir de sexe oral ?) Bref. C’est ce qu’il est en train de faire, quoi ! Le taxi qui va bien­tôt arri­ver dans le centre-ville, et Char­lie Parker est là, à bouf­fer son poulet, avec la fille qui fait : « blup blup blup blup blup », tu vois ? Comme ça !
Char­lie jette un coup d’œil à Miles et il lui fait : « C’est l’hor­reur pour toi, hein ? Ça te choque à fond, hein ? » Et Miles lui fait : « Ben oui, évidem­ment ! Déjà, je n’ai aucune envie de voir tes conne­ries, là ; mais en plus, on va arri­ver dans le Centre, quoi ! »
Et là, Char­lie lui répond : « Ben ne regarde pas, alors, Ducon ! » [Rire]


"Didier Super pas du tout en concert. Ta vie sera plus moche que la mienne." Didier Super avec un nez de clown devant une foule.

Didier Super :

Tu veux une blague ? Attends… Qu’est-ce que euh… Ça fait long­temps que j’ai pas raconté une blague ! Euh… Attends. Ça va venir, hein. De toutes façons, c’est du numé­rique, hein, ça use pas la bande !…
Hmmm… Une blague… Putain, je les ai toutes oubliées !
La seule que je connaisse vrai­ment, c’est : « Comment on fait pleu­rer une petite fille pour la deuxième fois ? C’est quand t’es­suies ton zizi plein de sang sur son nounours ». Mais putain, c’est la seule que j’ai rete­nue !